Interview à la Future News - 20 juillet 2010

Q : Votre Excellence est-ce que les incidents qui se sont déroulés entre la FINUL et ‎population au Sud sont clos, vous dites on verra, comme si vous n’êtes si sûr, pourquoi ? ‎

R : Je pense qu’ils sont clos. Jusqu’à quand ? Je ne le sais pas. Je crois qu’il y a un grand ‎effort de toutes les parties concernées, des hommes politiques libanais, des responsables qui ‎ont une autorité sur le terrain pour essayer de mettre ces événements assez tristes derrière ‎nous. Il y a eu un engagement du gouvernement libanais. Celui-ci a publié un communiqué de ‎presse après le Conseil des Ministres. C’est un communiqué qui a d’ailleurs été salué par le ‎Conseil de sécurité, et un certain nombre d’engagement ont été pris, par exemple celui de ‎renforcer le nombre des soldats libanais au Sud du Litani. Ce sont des engagements qui ‎étaient préparés à l’avance, je comprends, et leur annonce est survenue au bon moment. Nous ‎attendons de voir, avec confiance, et nous n’avons pas de raison de mettre en cause la parole ‎des responsables, que cet engagement se concrétise sur le terrain. ‎

Q : Vous avez qualifié ces incidents d’inacceptables, ce qui m’a attiré l’attention en fait c’est ‎que vous les avez qualifié d’inacceptables après leur déroulement. Comme si, permettez-moi ‎de faire une analyse là-dessus, vous dites écoutez, l’autre fois on n’a pas réagi, mais cette ‎fois-ci on va réagir. Réagir comment ? Formez une force de frappe au sein de la FINUL, ‎changer les règles d’engagement. ‎

R : Mais vous auriez attendu que je m’exprime sur le sujet, que je qualifie ces incidents ‎inacceptables, avant même qu’ils ne se produisent ? Cela n’a aucun sens. Parfois la diplomatie ‎a besoin d’un peu de recul. C’est vrai que nous avons considéré que ces incidents étaient ‎graves, par leur nature. Maintenant nous considérons que ces incidents sont inacceptables ‎effectivement. Le porte-parole du Quai d’Orsay a utilisé une autre expression, il a dit qu’ils ‎suscitaient l’incompréhension. Pourquoi l’incompréhension ? Parce que les forces des ‎Nations Unies, la FINUL, ont un mandat précis, à la demande des autorités libanaises, un ‎mandat international élaboré par le Conseil de sécurité en concertation avec le gouvernement ‎libanais de l’époque, qui était le Premier Ministre Siniora, qui est intervenu dans les ‎discussions. Nous avons tenu compte dans l’élaboration de cette résolution de la nécessité que ‎cette résolution favorise l’affirmation de l’autorité de l’Etat libanais au Sud-Liban. Donc, oui, ‎ces forces de la FINUL sont là pour un mandat précis, qui est d’éviter la répétition ‎d’incidents, et d’aider l’armée libanaise à se déployer. Elles ont rempli ce mandat de façon ‎tout à fait admirable. Oui, ces incidents nous ont surpris par leur nature violente et nous ont ‎amenés à réagir de telle façon qu’on puisse tenter de trouver une explication. En tout cas, ‎éviter que ce type d’incidents ne se répète. Je l’ai déjà dit dans mes rencontres avec des ‎journalistes, les forces de la FINUL ne sont pas des troupes d’occupation, elles ont un mandat ‎international, au bénéfice de la stabilité régionale et au bénéfice du Liban. Ces incidents, qui ‎mettent en péril les forces des Nations Unies, et risquent de conduire à des incidents encore ‎plus graves, soit des blessés du côté de la FINUL, soit des blessés du côté de la population ‎civile, nous souhaitons qu’ils ne se renouvellent pas et je suis plutôt confiant aujourd’hui. ‎

Q : Ils sont visiblement coordonnés, c’est ce que vous avez dit à L’Orient-Le Jour, est-ce que ‎vous accusez le Hezbollah ? ‎

R : J’ai dit visiblement coordonnés. M. Michael Williams a dit orchestrés. Tout cela veut dire ‎un peu la même chose. Disons que la simultanéité de ces incidents et le fait qu’ils se ‎produisent dans une zone relativement restreinte, laissent à penser qu’il y a eu une volonté ‎d’adresser un signal à la FINUL. Maintenant, je ne suis pas là pour accuser un quelconque ‎parti libanais, les diplomates sont faits pour trouver des solutions. Et je crois que, aussi bien le ‎Hezbollah que M. Nabih Berry, et toutes forces politiques libanaises qui ont réagi, sont tous ‎allés dans le même sens, c’est-à-dire ont transmis un message d’apaisement. ‎

Q : Si on remarque que ce point de vue n’est pas partagé avec le Président de la ‎République, le Général Michel Sleiman, qui a pris faits et causes pour les villageois. Je vous ‎cite ce qu’il a dit : « Les exercices militaires ne devraient nullement être exercés à l’intérieur ‎des villages. La FINUL doit défendre le Liban. On est face à deux scénarios ». ‎

R : On peut toujours prendre une déclaration un moment donné, et trouver une autre ‎déclaration qui a un autre sens. Le Président de la République libanaise, le Général Sleiman, a ‎dit ce que vous venez de rappeler mais il a aussi fait d’autres déclarations qui sont des ‎déclarations qui vont dans le sens de l’apaisement. ‎

Q : Comment expliquez –vous que l’armée libanaise ait rejeté le contenu des manœuvres de la ‎FINUL parce qu’elles reposent sur l’éventualité d’une attaque de missiles contre les ‎territoires occupés sans tenir en compte d’ une invasion israélienne contre le Liban ? ‎

R : Je ne suis pas le porte-parole de l’armée libanaise. Posez la question à l’armée libanaise. ‎La FINUL fait ce qu’elle pense devoir faire dans le cadre de son mandat et dans le cadre de ‎ses obligations d’entraînement, de ses obligations opérationnelles pour remplir ce mandat. ‎Elle a pensé que ces exercices étaient nécessaires. Il ne s’agit pas de toujours vouloir tout ‎concilier. Il peut y avoir, à un moment donné, l’utilité de faire un exercice sur un thème ‎particulier. Ce qui n’empêche pas, à une autre occasion, de faire un exercice sur un autre ‎thème. Il était prévu, dans un premier temps, un exercice tournant autour de l’envoi de ‎roquettes sur Israël, et après d’autres exercices de nature différente étaient également prévus. ‎Ce que je voulais simplement dire et réaffirmer, c’est que notre objectif est de favoriser le ‎déploiement de l’armée libanaise. On verra, il y a des engagements qui ont été pris, et nous ‎attendons maintenant qu’ils se concrétisent. Notre autre objectif c’est d’éviter une reprise de ‎la tension et d’un conflit dans cette région. Mais pour l’instant, c’est-à-dire 2006 et depuis la ‎résolution 1701, le Sud vit globalement une situation de calme. ‎

Q : Comment pourriez-vous alors expliquer que la FINUL ait reçu une liste israélienne pour ‎fouiller les communes libanaises, pour fouiller les maisons, et cela a été critiqué par l’armée ‎libanaise ? ‎

R : Je ne peux pas vous laissez dire cela. Je doute fortement que la FINUL ait reçu ce type de ‎liste, et en tout cas, si jamais, à supposer, question hypothétique, qu’elle ait reçu ce type de ‎liste, qu’elle se charge de la mettre œuvre. La FINUL n’est pas l’instrument d’Israël. Elle a ‎une mission, je vous ai donné d’ailleurs tout à l’heure les éléments de cette mission, et elle ‎s’en tient là. ‎

Q : Il y a eu une interprétation équivoque de la 1701. Quand vous demandez de respecter la ‎liberté de mouvement de la FINUL, est-ce que cette liberté permet à la FINUL de réagir ou ‎bien de faire ces opérations à l’insu de l’armée libanaise ? ‎

R : A l’insu non, parce que la FINUL n’a rien à cacher a priori à l’armée libanaise, au ‎contraire, la FINUL se doit d’être transparente vis-à-vis de l’armée libanaise. Simplement ce ‎que nous considérons, et je le répète encore solennellement devant tous nos téléspectateurs, ‎c’est que il n’existe pas d’opération de maintien de la paix - parce qu’il s’agit d’une opération ‎de maintien de la paix - sans liberté de mouvement. Quel serait le sens d’une opération de ‎maintien de la paix, si des soldats qui ont la tâche difficile de mettre en œuvre cette opération, ‎sont cantonnés dans des casernes, ou dans des bases militaires. Cela n’aurait strictement ‎aucun sens. Il faut que la FINUL puisse remplir son mandat. Il faut qu’elle puisse se déplacer, ‎avec l’armée libanaise à chaque fois que c’est possible, sans l’armée libanaise, si cela n’est ‎pas possible. Nous préférerions évidemment qu’il puisse y avoir une plus grande coordination ‎entre l’armée libanaise et la FINUL. Je crois que cette coordination existe. Mais il arrive un ‎moment où, pour des raisons qui sont propres à l’armée libanaise, et pour des raisons qui sont ‎propres à la FINUL , la FINUL peut considérer qu’elle peut aller de l’avant, parce qu’il en va ‎de sa crédibilité. Je rappelle que le mandat de la FINUL, c’est d’abord une forme de ‎dissuasion contre tout acte hostile dans cette région si difficile et compliquée. ‎

Q : Ah très bien, malgré cela, on voit les violations israéliennes de l’espace aérien libanais, ‎par les avions de reconnaissance israéliens, on ne voit aucun effort onusien de s’opposer par ‎force à ces survols. ‎

R : Pour la France, les choses sont très claires : nous estimons que ces survols israéliens du ‎territoire libanais sont une infraction en violation de la lettre et de l’esprit de la résolution ‎‎1701. Nous le disons à chaque fois. Et vous le retrouverez également dans les rapports des ‎Nations Unies sur la mise en œuvre de la 1701. Je crois que les choses sont claires. ‎

Q : Bien avant ces incidents, Monsieur l’Ambassadeur, entre la population et la FINUL bien ‎sûr, et selon le journal As Safir, le Chef de l’État Major Lafontaine est accusé de troubler les ‎rapports avec la population et d’être inutilement hostile. Aujourd’hui il est remplacé par un ‎autre général, avant que le terme de son mandat n’expire. Est-ce qu’il y a un lien ? ‎

R : Je réponds : fantasme ! C’est absolument n’importe quoi. J’ai beaucoup de respect pour la ‎presse libanaise parce qu’elle est libre, le Liban est un pays où il y a la liberté de la presse et ce ‎n’est pas un vain mot. L’avantage, c’est qu’on trouve d’excellents articles. L’inconvénient, ‎c’est que parfois, on y lit des choses qui ne sont pas vraies. Le Général Lafontaine est un très ‎bon soldat. Il a rempli son mandat. Son mandat était d’une année. Personnellement je trouve ‎qu’une année c’est très court pour saisir toute la complexité de la région. Il était prévu qu’il ‎parte début juillet, et tout ce qui s’est dit sur un départ précipité, sur son remplacement ‎accéléré par un autre Général, n’a strictement aucun sens. Je vous assure. Sa relève était ‎prévue, il a fait un bon travail et je tiens à lui rendre hommage. C’est un soldat qui a mis en ‎œuvre des instructions, des règles d’engagement qui étaient fixées et qui étaient donc les ‎siennes. Je rappelle également, parce que c’est important, qu’on tend à singulariser le ‎contingent français. La FINUL a une responsabilité militaire et politique qui est partagée par ‎la communauté internationale. C’est celle-ci qui a souhaité que la FINUL soit là. Les règles ‎d’engagement, les règles d’action qui ont été fixés sont les mêmes pour tous les contingents. ‎Le contingent français, de ce point de vue, ne se différencie pas. Il y a une même mission, un ‎même drapeau des Nations Unies, un même fameux béret bleu clair. Nous travaillons dans le ‎même cadre, qui est la mise en œuvre de la 1701. ‎

Q : Votre Excellence, on va aborder la question de la France et le tandem Amal-Hezbollah. le ‎député du Hezbollah, Nawwaf El-Moussaoui a qualifié les relations avec la France comme ‎étant en dents de scie. Elles avancent, elles reculent, et ce, à cause de la relation que la ‎France entame avec Israël . Qu’en dites-vous ? ‎

R : Je ne comprends pas très bien ce qu’il a voulu dire. Je ne pense pas qu’il y ait une relation ‎en dents de scie entre la France et le Liban. Je crois, au contraire, que ces relations ‎s’inscrivent dans une grande continuité, et que la France a toujours été aux côtés du Liban ‎dans les jours difficiles comme dans les jours plus heureux, et on souhaite qu’il y ait plus de ‎jours heureux évidemment. Quant à la relation avec Israël, je crois que le Président de la ‎République M. Sarkozy a toujours été très clair. La France attache du prix à la sécurité de ‎l’État d’Israël, en même temps, elle pense que sa sécurité ne pourra être réelle et effective ‎sans paix avec les pays voisins, en particulier tant qu’il n’y aura pas un État palestinien. Nous ‎avons toujours défendu le fait que la principale question qui perturbait le Proche-Orient et qui ‎avait des conséquences très négatives dans beaucoup de pays du Proche-Orient, était ‎l’absence de solution à la question israélo-palestinienne. Et nous pensons à la création d’un ‎État indépendant, digne, démocratique, viable surtout. La France a toujours été à la pointe de ‎la définition de cet État, et je crois que la France, au côté de ses partenaires européens, sera ‎prête également, le moment venu, à apporter des garanties pour que cet État puisse vivre ‎normalement au cœur du Moyen-Orient. Je crois que la position du Président Sarkozy est ‎équilibrée : il a un attachement à la sécurité d’Israël, il a un attachement à la réalisation des ‎droits légitimes du peuple palestinien. Et nous avons beaucoup poussé aussi pour que l’Union ‎Européenne prenne une position claire, par exemple sur Jérusalem. Nous disons que ‎Jérusalem doit être partagée. Elle doit être la capitale de deux Etats, ce qui veut dire, si on ‎prend les bonnes lunettes pour lire les déclarations officielles, que Jérusalem soit aussi la ‎capitale de l’Etat palestinien. Donc, je ne vois pas très bien ce que veut dire M. Moussaoui, ‎mais je prends note de sa déclaration. ‎

Q : Est-ce qu’il y a un contact direct aujourd’hui entre les responsables politiques français et ‎les responsables du Hezbollah. A quand remonte la dernière rencontre entre les deux ‎parties ? ‎

R : Je ne peux pas vous le dire précisément, mais ces contacts ont toujours été réguliers. Je ‎vous rappelle d’ailleurs que c’est Bernard Kouchner qui avait invité - et il avait été critiqué à ‎l’époque et ce n’était pas une décision aussi facile à prendre- le Hezbollah, comme tous les ‎autres partis libanais, à Rambouillet pour essayer de trouver une solution politique à la crise ‎que traversait à l’époque le Liban. Depuis, ces contacts avec le Hezbollah n’ont jamais cessé. ‎Beaucoup de parlementaires en mission, de ministres français, et en tout premier lieu ‎évidemment Bernard Kouchner, lorsqu’ils viennent au Liban, rencontrent les responsables du ‎Hezbollah. Lors de sa dernière visite, il ne l’a pas fait parce qu’il n’est resté que quelques ‎heures à Beyrouth et n’a pas rencontrer que le Premier Ministre et le Président de la ‎République. Mais nous n’avons strictement aucune prévention et aucune objection à ce que ‎les officiels français rencontrent le Hezbollah. Je le fais moi-même à mon niveau et nous ‎sommes en contact permanent avec le Hezbollah. Nous considérons que c’est un parti ‎politique qui participe à la démocratie libanaise en participant aux élections. Il a des élus au ‎parlement, il fait par surcroît partie du gouvernement d’Union nationale et nous avons des ‎relations, des relations d’échange et de coopération avec ce gouvernement. Mes instructions ‎sont très très claires : pour l’Ambassadeur de France, il s’agit de parler à toutes les parties ‎libanaises, y compris le Hezbollah. ‎

Q : On passe à l’accord de coordination sécuritaire entre le Liban et la France. Le tandem ‎Amal-Hezbollah veut que le mot terrorisme soit clairement défini dans le texte ou que toute ‎clause qui évoque la lutte anti-terroriste soit supprimée. Le porte-parole du Ministère des ‎Affaires étrangères, M. Valéro, a déclaré que cet accord est classique. Est-ce vous êtes contre ‎toute modification de l’accord ? ‎

R : Je pense qu’il faut regarder cet épisode avec un peu de recul et de sérénité. Le Président ‎du Conseil des Ministres, M. Saad Hariri, est allé à Paris en janvier. Dans la perspective de sa ‎visite un certain nombre d’accords ont été discutés entre le gouvernement libanais et le ‎gouvernement français, parmi lesquels cet accord de sécurité qui porte sur beaucoup ‎d’aspects, y compris par exemple la défense civile. Les discussions ont été productives, et les ‎ministres de l’Intérieur, M. Ziyad Baroud, et M. Hortefeux, pour la France, ont signé cet ‎accord en marge de la visite de Saad Hariri. Cet accord a été soumis à l’approbation du ‎Conseil des ministres libanais qui, je le rappelle, est un gouvernement d’union nationale. A ‎l’époque, nous n’avons pas entendu d’objection. Maintenant, comme dans tout pays ‎démocratique, où il y a une procédure de contrôle des accords et traités internationaux par le ‎parlement, l’accord a été transmis au parlement libanais comme il le sera plus tard pour ‎ratification au parlement français. Et là, dans les commissions parlementaires, l’ensemble des ‎députés du Hezbollah et de Amal, et peut-être d’autres, aussi ont émis des objections. Cela ‎fait partie, du cours normal de la vie d’un accord entre sa conception et le moment où il est ‎ratifié. M. Baroud a fait une proposition, je crois, devant la commission compétente du ‎parlement libanais. M. Nabih Berry s’est aussi beaucoup impliqué pour essayer de trouver ‎une solution. Vous savez qu’elle est cette solution qui est que le Liban, dans sa conception du ‎terrorisme, se réfèrera à la définition du terrorisme telle qu’elle a été donnée en 1998 par la ‎Ligue Arabe. La France, pour sa part, n’a jamais donné de définition au terrorisme. Par ‎contre, elle est partie à des conventions internationales qui traitent de ces questions. ‎

Q : Pouvez-vous me donner aujourd’hui une définition du terrorisme ? Selon vous selon la ‎Franc, par exemple : est-ce que le Hezbollah peut ouvrir des comptes bancaires en France . ‎

R : Honnêtement je ne vais pas m’amuser à donner une définition (m’amuser c’est une façon ‎de parler !) du terrorisme alors que mon gouvernement ne le fait pas. Je pense qu’il y aura une ‎solution, qui sera trouvée. Vous savez, cet accord est un accord cadre. Une chose est sûre, ‎c’est que cet accord doit être approuvé par le Conseil des Ministres, approuvé par le ‎parlement et ratifié. Il y a un accord inter-gouvernemental qui suit son cours et doit être ‎soumis au Parlement. C’est tout. On est dans le cadre des procédures habituelles. Pour ‎l’instant il n’y a rien qui nous étonne. Certains parlementaires libanais ont soulevé des ‎objections, ils sont dans leur droit. Ce qui serait bien c’est qu’une solution soit trouvée. Mais ‎je voudrais dire que cet accord est un accord cadre dans la mesure où rien ne peut se faire ‎contre l’avis de l’autre partie. C’est une sorte d’accord à la carte. S’il y a un type de ‎coopération qui ne convient pas au Liban, on ne le fait pas. Il faut nécessairement que les ‎deux parties se rencontrent pour que l’accord ait une vie. ‎

Q : Vous venez de parler du Chef du parlement libanais Nabih Berry qui voudrait amender le ‎texte et donner une définition libanaise du terrorisme. Il estime que la définition donnée par ‎la Ligue arabe n’est pas suffisante parce que les Arabes peuvent changer selon lui. ‎

R : Mais les Libanais ne peuvent pas changer ? ‎

Q : Est-ce que la France pourrait un jour ajouter le Hezbollah à sa liste des organisations ‎terroristes ? C’est cela la question. ‎

R : La facilité ce serait de vous répondre, comme on répond pour ce type de question, que ‎c’est une question hypothétique. Si on commence à échafauder des scénarios à plusieurs ‎inconnues dans l’avenir, on ne s’en sort pas ! Ce que je peux vous dire c’est que la France a ‎résisté à des demandes de certains pays, il y a quelques années, pour que le Hezbollah soit mis ‎sur la liste des organisations terroristes, et je n’ai pas connaissance d’une quelconque ‎disposition du gouvernement français à changer de position. ‎

Q : Vous avez des accords avec Israël. Est-ce que ces accords permettent au service de ‎sécurité israélien d’avoir un accès aux informations collectées par le service de sécurité ‎libanaise, ce , après les accords sécuritaires entre le Liban et La France. ‎

R : Là je vais être très très franc. Vous me posez une question à laquelle je ne peux pas ‎répondre. Je ne connais pas ces accords. Je ne connais pas leurs dispositions et je ne connais ‎pas le type de coopération qui peut exister. Mais la France entretient des relations de ‎coopération avec beaucoup de pays, beaucoup de services, comme c’est normal. Cette ‎coopération est plus ou moins étendue, plus ou moins détaillée, et nous entretenons d’ailleurs ‎une coopération avec les différents services libanais. ‎

Q : La France et les partis libanais. On a vu le Patriarche Sfeir à Paris dans le cadre d’une ‎visite officielle suivie du Dr. Geagea qui a rencontré le chef de la diplomatie française, M. ‎Bernard Kouchner. Est-ce par hasard que ces deux visites ont eu lieu en même temps ? ‎

R : Et bien oui c’est par hasard, parce qu’il arrive des hasards dans la vie. Il se trouve que M. ‎Geagea, qui faisait une tournée, d’abord en Égypte, ensuite en Espagne, s’est trouvé à Paris au ‎moment où le Patriarche Sfeir se trouvait à Paris. Cela ne l’a pas empêché donc d’être reçu ‎par Bernard Kouchner. ‎

Q : Où en est-on aujourd’hui de la visite officielle du Général Aoun à Paris, le Chef du ‎Courant Patriotique libre ? ‎

R : J’ai pas eu vent d’un projet en ce sens. Je lis la presse, mais pour l’instant, je ne suis pas ‎informé d’une quelconque date. Cette visite se fera peut être un jour. Mais pour l’instant je ne ‎suis pas informé d’une visite prévue.‎

Q : Mais selon le journal Al Hayat, la France a ajourné la visite du Général Aoun pour ‎accueillir le Patriarche Sfeir avant lui. ‎

R : Eh bien, il faut que je lise plus souvent le journal Al Hayat !‎

Q : La France est critiquée d’adopter une politique discriminatoire. Elle est proche des uns ; ‎loin des autres. Qu’en dites-vous ? ‎

R : Je ne crois pas. Je crois que c’est peut être ce que pensaient beaucoup de Libanais de la ‎politique qui était suivie jusqu’à présent. Je crois que la situation politique au Liban a ‎profondément changé. Comme je l’ai dit tout à l’heure, mon rôle c’est de parler à tous les ‎Libanais. Je crois qu’il y a des symboles qui sont très forts. Le fait que le Président Sleiman se ‎soit rendu en visite d’État en France, c’est très important. Le fait qu’il ait invité le Président ‎Sarkozy à venir au Liban pour une visite d’État c’est également important. Le fait que M. ‎Saad Hariri soit venu en visite officielle, durant laquelle plusieurs accords ont été signés, c’est ‎aussi une chose importante. Nous attendons la visite de M. Nabih Berry. Dans une période ‎relativement courte, finalement les trois Présidents, comme on dit au Liban, seront venus en ‎France. La visite du Cardinal Sfeir était très importante pour moi, et pour les autorités ‎françaises. Parce que je crois qu’il n’y a pas de grand pays qui ne respecte pas son histoire. Et ‎même si aujourd’hui le Liban a changé, même si nous avons à cœur de, encore une fois, ‎parler à toutes les parties libanaises, il existe aussi des fidélités historiques, des liens du cœur ‎qui restent importants. Il était important d’entendre le Patriarche, et sa visite a été très réussie. ‎

Q : Le Chef du Courant Patriotique libre Michel Aoun a fait part d’un scénario de guerre au ‎Liban, lié au TSL, tribunal spécial pour le Liban, et ce d’après les sources diplomatiques ‎occidentales. ‎

R : Tous les jours je lis qu’il y a des sources occidentales qui ont évoqué telle ou telle ‎hypothèse. Quand on lit la presse libanaise, ou régionale, on lit tout et son contraire ! Je ne ‎pense pas qu’il y ait un risque de conflit régional. Je ne pense pas qu’il soit dans l’intérêt ‎d’Israël de s’engager dans un conflit avec le Liban et je crois que c’est n’est pas non plus ‎l’intérêt du Liban, de toutes les parties libanaises. Je n’ai pas d’inquiétude particulière et je ‎pense que j’exprime un point de vue assez dominant. Les visiteurs étrangers qui sont là à ‎Beyrouth, dans l’ensemble, transmettent un message rassurant, c’est le message d’ailleurs ‎qu’a transmis Bernard Kouchner quand il est venu il y a un mois et demi ou deux mois au ‎Liban. Maintenant, quelles seront les conséquences du TSL, je n’en sais rien. Ce qui compte ‎pour la France c’est que le TSL puisse travailler en toute indépendance, c’est pour cela qu’il a ‎été créé. Je n’ai pas idée des conclusions que va tirer le juge Bellemare, le procureur, de son ‎enquête et du type de mises en accusation qui vont être publiées. Nous, notre position a été de ‎faire confiance à la justice internationale, d’attendre qu’elle prenne ses décisions. Et je crois ‎qu’il faut passer un message de sérénité parce qu’il est de l’intérêt de tous les pays de ‎connaître la vérité sur ce qui s’est passé, et que c’est l’intérêt de tous de refuser l’impunité .La ‎tendance dans le monde actuel c’est au rejet de l’impunité. On le voit bien avec la création de ‎la Cour pénale internationale, où des tribunaux spécialisés comme celui sur le Ruwanda. Le ‎sujet de l’impunité est devenu une problématique internationale. Parfois il faut connaître la ‎vérité pour mieux accepter le passé et préparer l’avenir. ‎

Q : Votre Excellence comment évaluez-vous la visite éventuelle du Président syrien Bachar ‎El-Assad au Liban, il vient dans le cadre d’un contexte politique instable, il y a les menaces ‎israéliennes contre le Liban, il y a le dossier nucléaire iranien, il y a l’affaire du processus de ‎paix. Comment voyez-vous tout cela ? ‎

R : Je crois qu’il faut voir cette visite éventuelle, qui n’est pas encore confirmée mais dont ‎tout le monde parle, dans le cadre d’abord syro-libanais. Un rapprochement a eu lieu entre la ‎Syrie et le Liban. Un ensemble de questions en suspens, de contentieux même qui doivent être ‎réglés entre les deux pays, je pense par exemple à la délimitation des frontières ou à la ‎question des disparus. La révision des accords a progressé ces deux derniers jours. Il y a ‎beaucoup de sujets à traiter entre le Liban et la Syrie. Vous savez que la France a accueilli très ‎positivement ce rapprochement, elle a même essayé, dans la mesure de ses moyens de le ‎favoriser. Je crois qu’on peut dire aussi que c’est grâce à son action que des relations ‎diplomatiques ont été établies entre les deux pays. La visite du Président Assad à Beyrouth ‎présenterait beaucoup d’avantages dans ce cadre là, parce qu’elle viendrait consacrer des ‎progrès enregistrés dans la relation entre la Syrie et le Liban. Le Premier Ministre Hariri s’est ‎rendu à plusieurs reprises à Damas. Il serait normal, entre États indépendants et se respectant ‎mutuellement, qu’il y ait des visites en retour de haut niveau. Donc, je crois que cette visite, ‎quand les conditions seront mûres, mais il ne m’appartient pas de les apprécier et cela fait ‎partie du dialogue entre la Syrie et le Liban, que ce serait un signal positif de la normalisation ‎des relations entre les deux pays. ‎

Q : Certains disent que la France a limité son ouverture à Damas, certains disent le ‎contraire, en février 2010 le Premier Ministre français s’est rendu à Damas, lors de sa visite, ‎il a, pour ne pas dire stipulé, il a lié les relations franco-syriennes aux efforts de Damas pour ‎le processus de paix et pour le dossier nucléaire iranien. Il a dit, permettez-moi de le citer : ‎Pour que la situation s’améliore, il faut que chacun fasse ses efforts. Est-ce que la Syrie a fait ‎ses efforts ? ‎

R : Je pense que quand le Premier Ministre Fillon a fait cette déclaration, il voulait dire que la ‎Syrie a un rôle important à jouer sur le plan régional. Si vous regardez la carte, entre l’Iraq et ‎sa situation si complexe, la problématique libanaise, la question israélo syrienne, on s’aperçoit ‎bien que la Syrie a une place centrale au Proche-Orient et qu’il est inutile, et c’est la ‎conclusion à laquelle est arrivé le Président Sarkozy, de l’ignorer comme cela a été fait un ‎certain moment. Il est plus utile de lui parler, d’essayer d’avoir un dialogue aussi positif et qui ‎produise des résultats que d’ignorer une réalité. Bien sûr, nous attendons des choses de la ‎Syrie. Nous attendons un comportement positif sur les sujets que j’ai évoqués. Nous ‎accueillons très positivement le rapprochement entre la Syrie et le Liban, à condition bien ‎évidemment que les relations entre les pays soient des relations de respect mutuel, respectant ‎l’indépendance de chacun et que rien ne soit imposé au Liban. ‎

Q : Le Président iranien, on a su, viendra bientôt au Liban. Est-ce qu’on voit aujourd’hui ce ‎qu’on appelle l’augmentation de l’influence des pays de la résistance passive face à une ‎éclipse partielle de l’influence des pays occidentaux dont la France fait partie ? ‎

R : Je pense que quand on appréhende la situation dans une région aussi diverse et ‎compliquée que le Proche-Orient, il faut prendre tout en considération. Bien sûr on peut ‎mettre en avant les relations entre la Syrie, l’Iran et le Hezbollah, mais on peut aussi ‎considérer la question sous un autre angle. Par exemple, tout le monde est frappé par le rôle ‎que joue aujourd’hui la Turquie dans la région. Et la Turquie est évidemment un acteur ‎essentiel dans la région. Pas seulement au Proche-Orient d’ailleurs, mais également vis-à-vis ‎de l’Europe, et de l’Asie centrale. C’est un pays qui a des relations de voisinage avec la Syrie, ‎des relations de voisinage avec l’Iran. Je pense que pour qu’il y ait un plus quelque part, il n’y ‎a pas forcément un moins ailleurs. Les pays occidentaux jouent le rôle qui doit être le leur. Ils ‎essaient de soutenir une reprise des discussions de paix. La France comme la Turquie, ‎souhaitait des négociations entre la Syrie et Israël en vue de l’évacuation du Golan. Nous ‎souhaitons également, et nous agissons pour cela que la question de Ghajar par exemple, qui ‎concerne directement le Liban soit résolue. Je pense qu’il faut se garder d’une lecture ‎simpliste qui ferait qu’il y aurait l’émergence d’une sorte d’axe, parce que vous savez, on a ‎connu le front du refus « Jabhat El Soumoud » etc.. On adore dans cette région du Proche-‎Orient ce type de lecture. On vit dans un monde global où chacun est influencé par l’autre et ‎influence les autres, c’est vrai dans la région mais cela se joue également ailleurs, aux Nations ‎Unies, et dans tous les forums internationaux. Aussi je mets en garde contre une lecture un ‎peu automatique qui ferait qu’on peut isoler tel aspect par rapport à tel autre. Et puis je crois ‎que l’Union Européenne essaie de jouer un rôle.. Ce n’est pas facile parce que nous sommes ‎‎27 et qu’il faut prendre des décisions ensemble. Le traité de Lisbonne qui vise précisément à ‎lui donner plus de la visibilité, et on voit que Mme Ashton par exemple est à Gaza. En ce qui ‎concerne le Président Sarkozy, je pense qu’il est très sincère dans sa volonté, comme je l’ai ‎dit tout à l’heure, de voir l’avènement d’un État palestinien. Aujourd’hui des pourparlers ‎indirects ont lieu sous l’égide des Américains entre Israéliens et Palestiniens. Est-ce qu’il y ‎aura des pourparlers directs ? Je ne le sais pas, mais nous sommes prêts, avec d’autres pays, à ‎soutenir ces efforts. Nous ne pouvons pas nous résoudre à ce que la question palestinienne ne ‎progresse pas, ce n’est pas possible. ‎

Q : Votre Excellence vous avez parlé du rôle de la Turquie dans cette région. Mais pourquoi ‎vous n’avez pas soutenu l’accord Brésil-Turquie-Iran ? Vous étiez derrière l’endurcissement ‎des sanctions contre l’Iran. Vous êtes accusés d’avoir joué un rôle injuste dans la région. ‎

R : Il faut voir les choses telles qu’elles sont. Nous n’avons pas condamné cet accord, au ‎contraire. Nous avons considéré que les efforts faits par le Brésil et la Turquie étaient tout à ‎fait louables. Le Président Sarkozy a bien veillé, dans ses relations le Président Lula, avec les ‎dirigeants turcs, à les soutenir. Nous pensons que leur contribution est positive. Il est toujours ‎préférable que certains pays parviennent à des résultats avec l’Iran, plutôt qu’il ne se passe ‎rien. Simplement, ce que nous disons, c’est que cet accord, quelles que soient ses qualités, ne ‎remplit pas ce que nous attendons de l’Iran. Il y a des résolution du Conseil de sécurité, et de ‎l’agence internationale de l’énergie atomique, laquelle a souvent pris des positions unanimes, ‎demandant à l’Iran de cesser ses activités d’enrichissement. Il est vrai qu’une partie de ‎l’uranium, avec l’accord avec la Turquie et le Brésil, pourrait être traité en dehors des ‎frontières de l’Iran, mais en même temps l’Iran a annoncé quasiment immédiatement qu’il ‎allait poursuivre l’enrichissement à 2 opc. On voit bien que cet accord, aussi méritoire soit il, ‎n’épuise pas la question, ne résoud pas les questions qui ont été posées par la communauté ‎internationale à l’Iran. Je vais revenir sur notre position vis-à-vis de l’Iran. Nous considérons ‎que c’est un pays important, qui a des intérêts légitimes et qui doit pouvoir avoir accès à ‎l’énergie nucléaire à usage pacifique. Mais l’Iran ne respecte pas ses obligations au titre du ‎traité de non prolifération nucléaire et cette politique ne peut pas être acceptée. Ce que nous ‎voulons, à travers les sanctions, ce n’est pas appliquer des sanctions pour des sanctions, mais ‎ramener l’Iran au dialogue. ‎

Q : Pourquoi vous ne traitez pas Israël à égalité avec l’Iran ? Pourquoi vous ne posez pas ‎des questions sur l’arsenal atomique israélien ? ‎

R : C’est une question qui a été abordée lors de la dernière conférence de révision du TNP. Il ‎doit y avoir une conférence en 2012, et il a été indiqué que la question israélienne sera ‎évoquée à ce moment là. ‎

Dernière modification : 28/06/2013

Haut de page